La notion de consentement chez les personnes DI-TSA
Le consentement est un terme que nous avons entendu à maintes reprises dans les dernières années et qui est toujours autant d’actualité aujourd’hui. Beaucoup de sensibilisation a été faite sur le sujet. Malheureusement, le non-respect du consentement est toujours un fléau social auquel nous devons remédier. Tout d’abord, qu’est-ce que le consentement? Le dictionnaire Larousse le décrit comme « l’action de donner son accord à une action, à un projet »[1]. Le consentement s’applique à tous les aspects de notre vie et doit être respecté en tout temps, et ce, peu importe de qui il s’agit. Cet article portera plus précisément sur la notion du consentement pour les personnes qui présentent une DI ou un TSA.
Consentement aux soins
Le respect du consentement aux soins est régi par la Loi sur les services de santé et les services sociaux et le Code civil du Québec. Ces deux lois indiquent clairement que « Nul ne peut être soumis sans son consentement à des soins, quelle qu’en soit la nature ».[2] Le Code civil du Québec ajoute que « Si l’intéressé est inapte à donner ou à refuser son consentement à des soins et qu’il n’a pas rédigé de directives médicales anticipées […], une personne autorisée par la loi ou par un mandat de protection peut le remplacer »[3]. Si une personne est déclarée inapte à consentir aux soins et qu’il y a absence de régime de protection, un parent proche ou une personne démontrant un intérêt particulier pour le majeur peut également prendre la décision en son nom[4]. En résumé, une personne qui présente une DI ou un TSA peut elle-même consentir aux soins qui lui sont procurés si elle comprend ce que cela implique. Si ce n’est pas le cas, quelqu’un prendra une décision en son nom dans son intérêt.
Pour ne pas porter à confusion, la Cour d’appel mentionne qu’une personne sous régime de protection n’est pas nécessairement inapte à consentir aux soins. En effet, quelqu’un peut avoir besoin d’aide pour la gestion de ses biens, mais être à la fois apte à consentir elle-même aux soins qui lui sont prodigués.[5]
Consentement sexuel
La notion de consentement sexuel est régie par le Code criminel. Ce concept s’avère assez complexe, car il comprend plusieurs exceptions et change en fonction de la situation et des personnes concernées. Bien entendu, pour que le consentement soit valide, il ne doit pas être donné par un tiers et la personne ne doit pas non plus être incitée à l’activité par abus de confiance ou de pouvoir. De plus, le consentement n’est pas valide lorsque la personne manifeste de façon orale ou comportementale l’absence d’accord à l’activité. À tout moment, la personne est aussi en droit de changer d’avis et de retirer son consentement.[6] D’autre part, dans plusieurs cas, le fait que l’accusé croyait que la victime était consentante ne constitue pas un moyen de défense acceptable. C’est par exemple le cas lorsque des mesures raisonnables n’ont pas été prises pour s’assurer de l’accord de la personne, ou lorsque la croyance provient d’un aveuglement volontaire.[7] D’autres exclusions sont aussi mentionnées à l’article 153.1 (5) du Code criminel.
Comme la législation ne fait pas mention exclusive des personnes qui présentent une déficience intellectuelle ou un trouble du spectre de l’autisme, la jurisprudence s’en charge et ajoute quelques précisions.
En effet, La Cour suprême du Canada, tout comme le Code criminel, a statué que le fait de croire que la victime était consentante ne constitue pas l’accord de celle-ci[8]. Le consentement est donc vicié, c’est-à-dire qu’il a été obtenu par erreur, ce qui le rend invalide[9]. Si, à tout moment, il a été possible de comprendre que la personne n’était pas consentante, l’accusé se trouve avoir commis une agression à caractère sexuelle.
La jurisprudence R c. Borris a aussi traité du consentement sexuel, plus précisément pour une personne qui présente une déficience intellectuelle. En effet, elle précise que la crédibilité d’un témoignage d’une personne qui présente une DI doit être évalué dans le même sens que celui d’un enfant. C’est-à-dire que le fait d’omettre des détails ou de se contredire n’est pas nécessairement volontaire et ne signifie pas que la personne ment ou invente les événements. Malgré cela, ses propos ne doivent pas être considérés moins fiables que ceux d’un adulte ne présentant pas de DI. Dans ce genre de situation, le tribunal devra évaluer les faits cas par cas.[10]
De nouveau, la Cour suprême du Canada s’est exprimée sur le témoignage d’une personne ayant une déficience intellectuelle. Comme il peut s’avérer plus difficile de raconter des événements dans un ordre chronologique avec précision pour une personne qui présente une DI, le tribunal et les acteurs du système judiciaire doivent tenir compte en tout temps de leurs besoins et de leurs particularités. Par exemple, la façon de formuler des questions devraient être adaptée afin de les rendre plus claires et simples. Il est aussi primordial de rester vigilant dans le but d’éviter des déclarations de culpabilité injustifiées[11] dues au manque de compréhension de la personne interrogée ou à son désir de plaire par exemple.
Comme le démontre le présent article, le consentement est un terme large qui s’applique à chaque geste que nous posons et le respect de ce dernier est primordial. Si tel n’est pas le cas, cela constitue une violation d’un droit fondamental et est sanctionnable aux yeux de la loi. Évidemment, le consentement ne s’applique pas seulement aux soins prodigués ou aux activités sexuelles. Cependant, ceux-ci touchent particulièrement les personnes qui présentent une DI ou un TSA et se doivent d’être respectés en tout temps, sans exception.
[1] LAROUSSE, « Consentement », (En ligne), https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/consentement/18359.
[2] Art. 9 al.1, Loi sur les services de santé et les services sociaux, c. S-4.2. et Art. 11 al.1, Code civil du Québec, RLRQ c. CCQ-1991.
[3] Art. 11 al.2, Code civil du Québec, RLRQ c. CCQ-1991.
[4] Art. 15, Code civil du Québec, RLRQ c. CCQ-1991.
[5] M.C. c. Service professionnel du Centre de santé et de services sociaux d’Arthabaska-et-de-l’Érable, 2010 QCCA 1114. (JuriBistro UNIK – CAIJ)
[6] Art. 153.1 (3), Code criminel, LRC 1985, c. C-46.
[7] Art. 153.1 (5), Code criminel, LRC 1985, c. C-46.
[8] R. c. Ewanchuk, [1999]1 R.C.S.330, (https://unik.caij.qc.ca/recherche#q=R.%20c.%20Ewanchuk%2C%201999%201%20R.C.S.%20330&t=unik&sort=relevancy&f:caij-unik-checkboxes=[Jurisprudence]&m=detailed&bp=results)
[9] CAIJ, « Dictionnaire de droit – consentement vicié », (En ligne), https://dictionnairereid.caij.qc.ca/recherche#q=consentement%20vici%C3%A9&t=edictionnaire&sort=relevancy&m=search.
[10] R. c. Borris, 2015 QCCQ 523, (https://www.canlii.org/fr/qc/qccq/doc/2015/2015qccq523/2015qccq523.html).
[11] R. c. D.A.I., 2012 CSC 5, [2012] 1 R.C.S. 149 (https://scc-csc.lexum.com/scc-csc/scc-csc/fr/item/7990/index.do).