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Entrée en vigueur aujourd’hui de la Loi visant à mieux protéger les personnes en situation de vulnérabilité (1er novembre 2022)

Adopté le 2 juin 2020, le projet de loi 18 ou Loi modifiant le Code civil, le Code de procédure civile, la Loi sur le curateur public et diverses dispositions en matière de protection des personnes entre officiellement en vigueur aujourd’hui, soit 1er novembre 2022. Cette loi, également nommée Loi visant à mieux protéger les personnes en situation de vulnérabilité, devait initialement entrer en vigueur au mois de juin 2022. Toutefois, en raison de la pandémie de COVID-19, le réseau de la santé et des services sociaux, acteur clé en regard de la bonne mise en place du projet, ne pouvait pas dégager les ressources nécessaires à la formation des professionnels de la santé relativement à l’utilisation des nouveaux formulaires d’évaluation et de réévaluation. Cette loi se veut un grand gain pour les individus présentant un trouble de développement intellectuel qui représente environ 40 % des personnes actuellement sous régime de protection public, et ce, du fait que la nouvelle législation soutient grandement l’autodétermination des individus considérés inaptes ou présentant certaines difficultés.

L’un des plus grands changements apportés par cette loi est l’abolition de deux régimes de protections, soit le conseiller au majeur et la curatelle. La tutelle deviendra ainsi le seul régime de protection au Québec. L’objectif promu par la nouvelle loi est la mise en place d’un dispositif de protection simplifié pouvant être adapté à chaque situation. Pour les personnes actuellement placées sous l’un des deux régimes de protection nouvellement abolis, la protection ne changera pas tant que la réévaluation médicale et psychosociale ne sera pas faite. Également, les curatelles seront à ce moment automatiquement converties en tutelles et les curateurs deviendront des tuteurs[1].

Un autre avantage de cette nouvelle législation est que les réévaluations médicale et psychosociale, qui devaient avant se faire de manière synchronisée et aux 5 ans, pourront désormais se faire de manière désynchroniser, mais devront toujours être faite à la même fréquence c’est-à-dire minimalement de façon quinquennale[2]. Cependant, afin d’éviter des procédures inutiles, une parenthèse dans la loi permettra au tribunal d’étendre le délai entre les évaluations, et ce, pourvu qu’il ne dépasse pas 10 ans. Il est à noter que cette parenthèse ne concerne que les personnes pour lesquels il est fort peu probable que la condition n’évolue. À l’inverse, la réévaluation pourra toujours être faite au besoin selon un changement dans la condition de la personne considérée inapte. Finalement, la nature de la tutelle pourra être à la personne, aux biens ou encore aux biens et à la personne.

En matière de droits, quelques changements très intéressants sont mis en place avec l’entrée en vigueur de la nouvelle loi. Comme le souligne le document intitulé La modulation de la Tutelle :  Une protection adaptée à la réalité de la personne produit par le Curateur public, la modulation de la tutelle s’inscrit dans une logique visant à accentuer les valeurs d’égalité, d’inclusion et de respect au sein du régime de protection. En ce sens, il est mentionné : « En partant du principe que chaque personne a la capacité d’exercer, l’ensemble de ses droits civils, le tribunal devra déterminer, lors de l’ouverture, si la tutelle sera ou non modulée. De plus, lorsqu’il accomplira des actes en son nom, le tuteur devra tenir compte des volontés et des préférences de la personne, en la faisant participer, selon ses facultés, à la prise de décision. »[3].

En modulant chaque tutelle selon les facultés de la personne, les individus placés sous régime de protection risquent moins de se voir soustraire certains droits fondamentaux sous prétexte de mesures de protection normalisées. Les personnes pourront désormais obtenir certains droits comme voter aux élections provinciales, municipales et scolaires, administrer un organisme à but non lucratif ou encore produire leur testament, à condition que ce dernier soit validé par le tribunal[4]. Cela s’ajoute aux droits déjà en vigueur pour les personnes actuellement sous curatelle comme exercer une autorité parentale, consentir à leurs soins (à condition que la personne soit évaluée apte à consentir au moment du soin) ou voter lors des élections fédérales. Plus concrètement, la tutelle modulable ne concernera que les personnes majeures sous tutelle et ne s’appliquera pas aux personnes ayant un mandat de protection homologué ou aux individus disposant d’une représentation temporaire[5].

La modulation de la tutelle consiste en une décision du tribunal dont le jugement vise à statuer sur les gestes que la personne inapte peut faire seule, les gestes qui doivent être faits avec l’assistance de son tuteur et finalement les gestes qui doivent être faits par son tuteur[6]. Il existe six objets de modulation qui ont été identifiés, toutefois le tribunal peut en tout temps ajouter d’autres objets de modulations relatifs à des actes précis, et ce, en fonction des facultés de la personne. Cette dimension qui considère au cas par cas les forces des personnes sous régime de protection offre la possibilité à certaines personnes de bénéficier de droits qui leur étaient jusque-là systématiquement retirés.

Par ailleurs, encadrée par la Loi visant à mieux protéger les personnes en situation de vulnérabilité, la mesure d’assistance vient également d’entrer en vigueur. Il s’agit d’une reconnaissance officielle qui ne nécessite aucune intervention d’un tribunal. La mesure d’assistance permet à un adulte éprouvant des difficultés de solliciter l’aide d’un proche afin de la conseiller quant à la meilleure décision à prendre dans une situation donnée ou relativement à la gestion de leurs biens[7]. Un ou deux assistants, choisis par la personne, pourront être reconnus et inscrits au registre public pour une durée maximale de trois ans. Cette attestation permettra au représentant d’agir comme représentant de la personne qu’elle assiste auprès d’entreprises, d’organisme, de ministère, etc. Pour bénéficier de la mesure d’assistance, la personne assistée doit démontrer qu’elle est en mesure de bien comprendre la portée de cette mesure et doit faire valoir sa capacité à exprimer sa volonté et ses préférences[8]. Dans ces conditions, une personne autiste ou présentant une DI pourrait tout à fait bénéficier de l’appui d’un assistant pour effectuer certaines actions. Or, la difficulté pour laquelle une personne sollicitera l’appui d’un assistant ne fera jamais l’objet d’une évaluation. Toutefois, comme la mesure d’assistance n’est pas l’équivalent d’une procuration l’assistant ne peut en aucun cas signer un document à la place de la personne assistée ou prendre des décisions pour elle. Il est également interdit à l’assistant d’agir dans une situation où il serait en conflit d’intérêts ou encore d’être rémunéré pour ses services rendus. Par ailleurs, afin d’éviter toutes formes d’abus, le curateur public devra effectuer certaines vérifications concernant l’assistant choisi. Entre autres choses, lorsque la demande lui sera soumise, le curateur devra vérifier les antécédents judiciaires de la personne proposée et solliciter l’opinion de deux personnes proches de la personne ayant soumis la demande d’assistance afin qu’elles se prononcent et qu’elles approuvent ou désapprouvent la nomination de l’assistant proposé. En somme, la décision de reconnaître officiellement un assistant revient au curateur public.

[1] Curateur public, La modulation de la Tutelle :  Une protection adaptée à la réalité de la personne, 2022, p. 2-4. [En ligne], consulté le 5-05-2022

[2] Idem.

[3] Idem.

[4] Idem.

[5] Idem.

[6] Idem.

[7] Curateur public, La mesure d’assistance; Une reconnaissance officielle pour aider un proche, 2022, p. 2-4., [En ligne], consulté le 5-05-2022

[8] Curateur public, La mesure d’assistance; Une reconnaissance officielle pour aider un proche, 2022, p. 2-4., [En ligne], consulté le 5-05-2022


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