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Un rapport d’évaluation pertinent aux constats troublants : Évaluation de la mise en œuvre de la Loi assurant l’exercice des droits des personnes handicapées en vue de leur intégration scolaire, professionnelle et sociale au cours de la période s’étendant de 2016 à 2020

Le ministre responsable des Services sociaux, Lionel Carmant, a déposé à l’Assemblé nationale du Québec au mois de novembre 2023, et ce, conformément à l’article 74.2 de la Loi assurant l’exercice des droits des personnes handicapées en vue de leur intégration scolaire, professionnelle et sociale (E-20.1) (la Loi), un rapport d’évaluation indépendant relatif à la mise en œuvre de cette même loi. En effet, conformément à cet article, le ministre responsable de la Loi doit, et ce, tous les 5 ans, mandater une firme externe afin qu’elle examine et analyse les modalités d’application de la Loi. Il s’agit du troisième rapport émit le premier ayant été publié en 2012 et le second en 2017. Ce travail fait de manière périodique permet de porter un regard critique non partisan sur les modalités d’application, l’efficacité, la fonctionnalité et la dimension opératoire de la Loi. Pour la dernière évaluation, le mandat d’évaluer la Loi a été octroyé à la Firme Sogémap qui a produit son rapport couvrant la période allant de janvier 2016 à décembre 2020 au ministère de la Santé et des Services sociaux au mois d’avril 2023. Le rapport se divise en 7 parties. Les deux premières visent à exposer la description du mandat, à mettre en contexte le rapport et énoncent les fondements de la Loi ainsi que la logique d’intervention sous-jacente. Les trois parties suivantes (3, 4, 5) exposent la manière dont la Loi est mise en œuvre, l’efficacité de la Loi et la gouvernance de cette dernière. La sixième partie du rapport propose une mise en contexte de la Loi et positionne cette dernière en relation avec les autres législations canadiennes visant l’établissement de normes d’accessibilité. Finalement, la septième et dernière partie est réservée aux recommandations concernant l’application de la Loi ainsi qu’au processus de suivi et de reddition de compte.

 

Les constats

Parmi les constats, sur la mise en œuvre de la Loi, la firme mentionne que « globalement, l’application de la Loi et la conformité des organisations assujetties progressent », toutefois « des améliorations demeurent souhaitables quant au contenu des plans d’action et des plans de développement »[1]. À cet effet, en ce qui a trait au transport adapté, le rapport mentionne que le taux de conformité demeure trop peu élevé quant à l’obligation des autorités organisatrices de transport (AOT) de produire un plan de développement en transport. Équivalent d’un plan d’action, mais spécifique aux services de transports, sont « le souvent mis à jour sur une base irrégulière et le ministère des Transports et de la Mobilité durable (MTMD) ne rend public aucun renseignement sur la qualité de ces plans et des raisons pour lesquelles des AOT ne se conforment pas à la Loi. Selon le rapport, seulement 42 % des AOT avaient en 2020 un plan de développement approuvé par le MTMD. Avec un tel constat, nous ne pouvons pas vraiment nous étonner de remarquer autant de défaillances importantes dans la manière dont le transport adapté est subventionné et organisé, et ce, quasiment partout au Québec. Toujours selon le rapport, le simple fait de produire un plan de développement ne signifie pas nécessairement que son contenu est de qualité et les mesures qu’il soutient sont adéquates. Comme le souligne le rapport, « il manque de l’information pour juger de la qualité des mesures inscrites dans les plans d’action ou les plans de développement en transport » et les données portant sur le niveau de réalisation de ces mesures sont particulièrement alarmantes puisqu’il s’agit dans la majorité des cas d’autoévaluation des organismes responsables qui ne permettent pas de savoir si les mesures ont été réalisées telle qu’énoncée dans le plan d’action ou le plan de développement. Pour illustrer la chose, c’est comme affirmer que l’on réussit un examen duquel nous avons nous-mêmes écrit les questions.

Les recommandations

Les recommandations émises dans le rapport concernent différentes dimensions de la Loi dont les modalités d’application de la Loi et le processus de suivi et de reddition de compte. Finalement, certaines recommandations concernent également la gouvernance de la Loi. Parmi les recommandations émises concernant l’application de la Loi, nous retrouvons :

  1. Le ministre devrait se donner les moyens d’obliger toutes les organisations assujetties à se conformer à la Loi.
  2. Le ministre devrait rendre publique, sur une base régulière (chaque année ou tous les deux ans), la liste des organisations assujetties et leur niveau de conformité à la Loi.

En ce qui a trait aux recommandations afférentes au processus de suivi et de reddition de compte, le rapport souligne les éléments suivants :

  1. Le ministre devrait définir les indicateurs qui permettront d’évaluer le niveau de conformité des organisations pour chacun des articles de la Loi qui les concerne.
  2. Le ministre, en collaboration avec le ministère de l’Emploi et de la Solidarité sociale (MESS) et le ministère des Transports et de la Mobilité durable (MTMD), devrait définir des objectifs précis à l’égard des effets attendus par les principaux articles de la Loi, soit les articles 61.1 concernant les plans d’action, l’article 63 portant sur la stratégie nationale et finalement l’article 67 relatif aux plans de développement en transport.
  3. Le ministre devrait élaborer une stratégie pour mieux documenter la situation des personnes handicapées à l’égard de l’utilisation des services publics.
  4. Le ministre devrait prévoir pour le prochain cycle de cinq ans de la Loi un cadre d’évaluation basé sur la mesure d’impact.

Ces recommandations sont d’une grande justesse et sont tout à fait pertinentes. Malheureusement, elles démontrent le manque important d’encadrement et témoignent du désintérêt de nombreuses instances politiques quant à l’opérationnalité et aux impacts que la Loi devrait avoir sur la vie des personnes vivant des situations de handicap. Finalement, les recommandations en lien avec la gouvernance sont les suivantes :

  1. Le ministre devrait donner à l’OPHQ un rôle de coordination dans le suivi de la Loi.
  2. Le ministre devrait définir dans la Loi des responsabilités particulières pour le ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur.
  3. Le ministre devrait prévoir un mécanisme de suivi des rapports indépendants.

Comme les recommandations précédentes, les recommandations afférentes à la gouvernance sont d’une grande pertinence. Nous soulignons le caractère un peu cavalier de la firme de mentionner en dernière recommandation que le ministre devrait effectuer un suivi des rapports indépendants et par extension donner un sens à ceux-ci.

Pour consulter le rapport en entier : file:///C:/Users/droit/Downloads/1131-20231123-2.pdf

[1] Sogémap inc. (2023). « Rapport d’évaluation : Production du troisième rapport indépendant sur la mise en œuvre de la Loi assurant l’exercice des droits des personnes handicapées en vue de leur intégration scolaire, professionnelle et sociale », [En ligne], p. 1. Consulté le 18 janvier 2024. file:///C:/Users/droit/Downloads/1131-20231123-2.pdf


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