Centre de documentation
Réflexions sur l’éducation inclusive et les dangers en regard de la mise en place d’un système d’éducation à deux vitesses
Au Québec, tous les enfants doivent obligatoirement fréquenter l’école et bénéficier d’un cadre d’enseignement dans lequel ils pourront s’épanouir et construire leur identité sociale . En 1999, François Legault, alors ministre de l’Éducation, signait la politique de l’adaptation scolaire Une école adaptée à tous ses élèves qui visait notamment l’intégration des élèves présentant un handicap ou rencontrant des difficultés d’adaptation ou d’apprentissage (HDAA) en milieu scolaire. Malheureusement, force est d’admettre que la voie facile, soit la voie parallèle, est encore aujourd’hui trop souvent présentée aux élèves a/Autistes et/ou dits « présentant une déficience intellectuelle » , et ce, notamment en raison d’un code de difficulté étiquetant l’élève non pas selon une évaluation fonctionnelle, mais selon un diagnostic. Qu'à cela ne tienne, le fond du problème ne réside pas tant dans la structure de la politique de l’adaptation scolaire, et ce, même si elle n’a jamais été révisée depuis la fin du XXe siècle, mais dans la manière dont elle est appliquée. Puisque le rôle de normaliser l’inclusion dans les classes ordinaires des personnes ayant un diagnostic de TDI ou de trouble du spectre de l’autisme (TSA) revient aux centres de services scolaire et qu’aucune législation n’encadre le processus visant l’inclusion ou l’exclusion des élèves, force est d’admettre que la voie de la facilité et des demi-mesures est trop souvent préconisée et se solde généralement par l’exclusion totale ou partielle des élèves jugés différents, et ce, en raison d’un mur de résistance venant de différents acteurs. Puisqu’il est impensable de penser l’égalité dans la séparation , comment peut-on affirmer que la société québécoise est égalitaire si dès l’enfance les institutions d’enseignements catégorisent et cloisonnent les élèves d’après leurs différences? Nous assistons un peu malgré nous à l’élaboration d’un système d’éducation à deux vitesses c’est-à-dire une voie normalisée pour les élèves sans diagnostic justifiant leur exclusion et une autre pour les élèves ostracisés en classe spécialisée, et ce, non pas en raison d’une réelle incapacité à progresser dans une classe régulière, mais simplement jugée du fait qu’ils présentent un code de difficulté afférent à un diagnostic. C’est ainsi que les jugements tombent dans notre système scolaire qui se veut sur papier inclusif. À cet effet, Noam Chomsky mentionne que : « Les jugements sont très souvent déterminés non pas tant par les preuves que par l’engagement idéologique. Peut-être est-ce regrettable, mais c’est ainsi : nous sommes bien obligés de prendre parti, malgré le peu de preuves à notre disposition. Nous pouvons adopter les opinions qui ont cours dans notre société, les accepter sans réfléchir, comme c’est souvent le cas, en nous conformant à l’idéologie dominante. Celui qui veut se faire sa propre opinion en toute connaissance de cause devra faire un effort. Il n’y a pas d’alternative. » ; or comme l’intégration des élèves HDDA n’est pas considérée comme une norme juridique impérative , cela permet aux acteurs réfractaires à l’inclusion de justifier sans effort l’exclusion de certains élèves en classe spécialisée.
Nous pouvons ainsi nous questionner à savoir pourquoi cette attitude d’exclusion devient la norme au sein du réseau scolaire québécois, et ce, alors que différentes législations et politiques valorisent une logique d’intégration. Afin de répondre à cette question, nous tenterons dans un premier temps de dresser un bilan visant à exposer la dichotomie entre le discours et les actes en regard de l’inclusion des personnes a/Autistes et/ou dites « présentant une déficience intellectuelle » en milieu scolaire au Québec. Dans un deuxième temps, nous proposons d’explorer certaines pistes de réflexion permettant d’expliquer le pourquoi de cette tendance. Précisons d’emblée qu’il ne s’agit pas d’effectuer une critique vide de substance souvent propre aux textes d’opinion, mais bien de réfléchir et tenter d’expliquer cette pratique sur le plan sociologique, philosophique et historique en l’inscrivant dans différents courants de pensée afférents à la pratique éducative.
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